Martin Soler, un ami et proche collaborateur, m’a récemment parlé d’un article qui a fait beaucoup de bruit et a entraîné de nombreuses controverses dans le milieu hôtelier.
Dans cet article, David Turnbull (cofondateur de la société SnapShot) déclare :
“ Si j’ouvrais un hôtel de zéro, je donnerais toute ma distribution aux OTA et me concentrerais uniquement sur mes clients et leurs expériences.”
Blasphème ou point de vue visionnaire ? Beaucoup s’accordent à dire que David blasphème. Je ne partage pas complètement leur opinion. En partant de sa conclusion, j’ai effectué ma propre analyse pour réellement examiner l’impact de l’expérience client sur la distribution de votre hôtel. En voici les résultats.
Bonne lecture !
Le SEO, il y a 15 ans
Le référencement naturel (également appelé SEO pour Search Engine Optimisation) a pendant longtemps été un levier majeur à la disposition des hôteliers indépendants. Lorsque j’ai débuté ma carrière de “marketeur” dans l’hôtellerie indépendante, en 2001, la société pour laquelle je travaillais vendait énormément de référencement naturel aux hôteliers. Et les résultats étaient bien là !
Avoir son hôtel en première page de Google sur des mots clefs comme “3 stars hotel in Paris”, “Charming Hotel Cannes” ou “Luxury Hotel in Burgundy” pouvait totalement faire la différence en matière de réservations.
Je me souviens encore d’un hôtel que nous avions ainsi référencé avec l’expression “Paris Hotel France” : il ne se remplissait pratiquement qu’avec les internautes le découvrant sur la première page de Google.
Comment a-t-il évolué ensuite ?
Progressivement, les choses ont évolué et cette magie s’est tout doucement éteinte. Il y a d’abord eu le lancement des Google Adwords et leur démocratisation en 2005. Ce système a permis aux OTA de venir du jour au lendemain faire concurrence aux hôtels, en payant pour se faire afficher en haut des classements.
Puis, avec le temps, les OTA et sites de commentaires ont grossi et leur contenu est devenu monumental. Ils ont alors détrôné les pauvres hôteliers indépendants qui avaient investi pendant de nombreuses années sur leur référencement naturel. Le SEO pour l’hôtel indépendant était mort !
Et pourtant…
Malgré ces grands changements, le trafic sur les sites des hôtels n’a presque pas baissé (à quelques exceptions près évidemment).
De l’OTA vers le site Web
Les OTA n’ont pas réellement apporté un afflux de nouvelle clientèle. Ils ont essentiellement détourné la clientèle existante des hôtels pour la redistribuer différemment.
Plusieurs analyses, en 2008 et 2009, ont démontré que les internautes arrivant sur Booking, Expedia et autres allaient ensuite visiter le site de l’hôtel. Le nombre de visiteurs sur les sites officiels ne baissait donc pas du tout. Et il était toujours possible d’obtenir des réservations en direct.
Ce fut la grande époque du “Direct Booking”. De nombreuses sociétés se sont alors spécialisées dans ce domaine. Elles utilisaient la puissance des OTA pour augmenter les réservations en direct.
L’impact du classement sur les OTA
L’une des grandes astuces pour améliorer les réservations en direct devint donc d’élever sa position sur les OTA. Même si le terme n’a jamais été inventé, nous aurions pu nous amuser à scander de grands slogans comme :
“Le SEO est mort ! Découvrez l’OEO* !”.
* Terme inventé pour : OTA Engine Optimisation
Sans jamais utiliser ce sigle bien sûr, de nombreuses sociétés se sont penchées sur le sujet et l’ont mis en pratique. Elles ont étudié les différents moyens pour augmenter leur classement sur les distributeurs. L’objectif prenait une direction différente, mais complémentaire : accroître le trafic sur le site officiel de l’hôtel pour obtenir plus de résas en direct.
Même si personne ne peut prétendre connaître parfaitement les algorithmes de classement sur Booking, Expedia et autres, certains éléments sont cependant notoires :
- Qualité de la page (photos / textes) ;
- Prix pratiqués ;
- Taux d’annulations ;
- Montant de la commission reversée au distributeur ;
- Note des internautes.
Tous ces critères permettent de monter dans les classements mais également d’apparaître en fonction des filtres que l’internaute applique à sa recherche.
Voici un exemple typique sur Booking.com : votre hôtel sera deux fois plus visité lorsque vous passerez d’une note de 7,9 à 8. Pourquoi ? Parce que l’un des filtres de recherche les plus cliqués sur Booking.com est celui n’affichant que les hôtels notés 8 ou plus.
L’expérience client a donc bel et bien un impact direct sur votre distribution et vos réservations en directes.
Bouche à oreille & fidélisation
L’expérience client impacte également de plusieurs autres facteurs en matière de distribution, dont le bouche à oreille et la fidélisation.
Rappelons que 27 % des réservations faites sur le Web ont démarré par la “recommandation d’une connaissance” et que 38 % des voyageurs séjournant dans les grandes villes y reviennent régulièrement.
Donc une excellente expérience client provoque et assure beaucoup de bouche à oreille et beaucoup de clients fidélisés. À condition bien sûr que vous ayez un afflux de nouveaux clients suffisants pour créer un impact tangible.
Conclusion
Bravo à David Turnbull pour son effet buzz ! Son article et particulièrement cet extrait quelque peu sulfureux sont une très belle opération marketing qui aura fait parler de lui. Mais ne limitons pas notre point de vue à ce constat… Car il apporte bel et bien sa pierre (et une pierre de qualité) à l’édifice du marketing hôtelier.
Mon analyse finale est la suivante :
Il est absolument certain que l’expérience client est un des facteurs déterminants dans la distribution hôtelière actuelle. Mais cela ne signifie pas qu’il faille dénigrer ou rejeter toute stratégie de Direct Booking. Il faut savoir faire la part des choses et faire les bons investissements sur sa distribution, son marketing direct et l’expérience client.